Fin 2005, Michel Baguéna crée la société MB Engine. Objectif principal : développer et valoriser le dispositif innovant de distribution variable Intelvalve à durée d’ouverture et levée de soupape variables pour moteur automobile. Parallèlement, MB Engine développe un élément hydraulique de rattrapage du jeu de soupape (EHRJS) particulièrement innovant.
Avec un père directeur général de la division mécanique du groupe Mors, qui avait installé un véritable atelier dans la maison familiale avec un tour, une fraiseuse et une rectifieuse universelle, il était tombé tout petit dans la mécanique, ce qui lui a procuré une grande maîtrise pratique en même temps que le goût de l’innovation. « J’ai toujours travaillé dans le domaine des moteurs », souligne-t-il. En 1974, encore étudiant à l’ESTACA il dépose un brevet sur la distribution variable des moteurs pour un dispositif à durée d’ouverture variable et levée maximale constante. Deux ans auparavant son père en avait équipé un moteur 1600 Alfa Romeo démonstrateur pour faciliter les contacts avec les constructeurs. Ce qui lui a permis de collaborer avec Matra Sport F1. Un moteur Matra 4 cylindres de 1 560 cm3 équipé d’un de ses dispositifs de cette classe fournit des résultats d’essais exceptionnels pour l’époque, encore très bons aujourd’hui.
Aperçu du moteur Matra à distribution variable MB Engine
Genèse du moteur
Sur la base du moteur Simca 1300 cm^3 qui équipait la voiture Matra Bagheera, le département Formule 1 de Matra Sport avait réalisé au début des années 1970 quelques moteurs prototypes coiffés d’une culasse à 16 soupapes reprenant la technologie de leur V12.
Le projet d’industrialisation restait en suspend et le patron du département M Georges Martin que j’avais contacté en 1974 pour lui présenter mon premier dispositif breveté de distribution variable, avait accepté que j’en équipe une des 6 culasses réalisées, pour des essais probatoires au banc moteur. Ca m’avait permis d’être un stagiaire privilégié jusqu’en 1978, année des essais réalisés avant l’interruption d’activité de deux ans du département Formule1.
Les arbres à cames variables d’admission et d’échappement généraient la même famille de lois de levées de soupapes avec un étalement allant de 190 à 320 (comme le V12 F1) degrés vilebrequin et avec une levée maximale constante égale à 8mm.
Après la réalisation des culasses prototypes, Simca avait sorti une version de son moteur réalésée (de 77 à 80mm), à course rallongée (de 70 à 78mm) pour porter la cylindrée à 1560cm^3.
La culasse Matra sans distribution variable avait fait l’objet d’essais pour les deux cylindrées qui avaient confirmé son sous-dimensionnement en 1560 cm^3 avec 82 ch/l ou 60kw/l à 6800 tr/mn contre 91ch/l ou 67 kw/l à 6800 tr/mn en 1300 cm^3 soit une dégradation d’environ 9%.
Des essais (selon norme DIN avec filtre à air et silencieux d’échappement) à pleine charge de la culasse à distribution variable, réalisés uniquement pour la cylindrée 1560 cm^3 sont représentés sur la planche jointe.
On relève les principales valeurs caractéristiques suivantes :
Puissance 147 ch ou 108 kw à 6800 tr/mn – Puissance spécifique 94 ch/l ou 69 kw/l
Couple 16.2 daN.m à 5200 tr/mn - Couple spécifique 10.4 daN.m/l
Consommation spécifique minimale 175 g/chh ou 235 g/kwh à 3000 tr/mn
Consommation spécifique à la puissance maximale 195 g/chh ou 265 g/kwh
Consommation spécifique inférieure à 185 g/chh ou 250 g/kwh jusqu’à 5600 tr/mn.
La dégradation progressive du rendement effectif au-delà est dû aux pertes mécaniques (embiellage – auxiliaires) et par transvasements (aérodynamique interne de culasse 1300 cm^3).
La planche de la courbe d’utilisation montre également les gains importants obtenus aux faibles et moyennes charges.
On peut estimer les performances qui auraient été obtenues avec la cylindrés de 1300 cm^3 de définition de la culasse en appliquant le coefficient de dégradation égal à 1.09, tiré des essais sans distribution variable.
Il vient pour la puissance spécifique 102 ch/l ou 75 kw/l à 6800 tr/mn et pour le couple spécifique 11.3 daN.m/l à 5200 tr/mn.
L’idée du dispositif de distribution variable Intelvalve remonte à sa thèse de docteur ingénieur sur « la distribution variable des moteurs » soutenue à l’université Pierre et Marie Curie en 1981. « J’avais été contacté par le motoriste Hyperbar Diesel pendant que je préparais ma thèse, raconte-t-il, ce qui m’a permis de commencer comme ingénieur-conseil pendant deux ans ». Il propose alors à plusieurs constructeurs de développer son concept, mais, à l’époque, celui-ci paraît trop novateur. Il passe ensuite trois ans au bureau d’études SEMT (société d'études de machines thermiques) des grands moteurs diesel d'Alsthom jusqu’à son rachat par MAN. Il y a élaboré un système breveté par la SEMT de bi-injection réalisant une pré-injection de 5 % de diesel oil et de l’injection principale de méthane comprimé à 250 bars, ou de certains fuels lourds difficilement inflammables. Il passe ensuite un an chez Magnetti Marelli à l’injection essence puis douze ans chez Peugeot Sports où il participe aux études et aux développements de tous les V10.
L’an 2000 voit la fermeture du département Formule 1 de Peugeot Sports et l’arrivée du Valvetronic de BMW, largement utilisé depuis par la firme allemande sur ses moteurs à essence. Toutefois, le brevet européen n° 0097665 de Michel Baguéna antériorise celui de BMW n° 0638706A1 relatif au système Valvetronic. Quelques années plus tard, en 2008, Toyota avec le système Valvematic et Nissan avec Infinity sortent des dispositifs de même inspiration. Ces mécanismes utilisent une chaîne cinématique à deux cames objet de la revendication principale du brevet européen MB de 1981, étendu aux Etats-Unis et au Japon. Les constructeurs cités ont pu reprendre ce principe fondamental alors dans le domaine publique pour leurs dispositifs dont seuls les détails technologiques propres à chaque constructeur ont pu faire l'objet d'une protection. Le marché lui paraît alors plus favorable pour reprendre et perfectionner son projet.
Avant même la création de MB Engine, il avait pu faire valider par SupMeca la bonne corrélation de ses logiciels propres de cinématique et de dynamique avec le logiciel Adams. En 2006, MB Engine obtient une nouvelle aide pour les pré-études CAO de faisabilité d’un démonstrateur monocylindre et d’une culasse spécifique à 4 cylindres.
L’architecture de cette dernière permet d’intégrer le mécanisme dans un encombrement réduit, grâce à une utilisation plus complète de l’espace disponible, n’exigeant pas de volume supplémentaire significatif par rapport à un mécanisme classique.
Pour les plans CAO, Michel Baguéna collabore avec Danielson Engineering, spécialiste des moteurs automobiles, issu de la compétition. Il travaille en liaison étroite avec Bernard Delaporte, le PDG, qu’il connaît bien, et Florian Durieux, le chef de projet. « J’avais réalisé les plans papier du démonstrateur monocylindre et de la culasse 4 cylindres, explique-t-il. Nous les avons transformés en plans CAO, sur Catia ». Travailler sur une base CAO facilite la compréhension du système pour les présentations aux constructeurs et pour les usinages en CN ou les calculs EF.
En 2015 des études de perfectionnement ont débuté pour le dispositif original breveté de commande de soupapes à durée d’ouvertures variables et à levée maximale constante.
Le développement de l’arbre à calmes variables (AACV) à travers des études d’adaptation et de faisabilité, a été mené sur deux moteurs d’un grand constructeur automobile durant trois années.
Bien que le projet ai été validé en commission technique, des désaccords sur les royalties en cas d’industrialisation n’ont pas permis qu’il aboutisse.
A la période du Covid débutant en 2020 et peu propice aux activités dans le domaine des moteurs a succédé en mars 2023 le vote par l’Union européenne de l’interdiction de commercialisation des voitures à moteurs thermiques en 2035 sauf à ne plus émette de CO2 fossile.
Dans ce contexte annonçant la fin de règne de la voiture à essence, MB Engine envisage les nouvelles stratégies de développements ébauchées en 4.
Moteur 1600 Alfa à double ACCV en tête
Distribution à durée d’ouverture de soupape variable - Moteur Matra - Département F1
Un moteur Matra 4 cylindres de 1 560 cm3, équipé de ce dispositif, fournit des résultats d’essais exceptionnels pour l’époque, encore très bons aujourd’hui.
Moteur Matra
Moteur IFP - Renault - CNRS
Pré-étude de la culasse 4 cylindres MB Engine